Pourquoi l'atténuation et l'adaptation sont complémentaires ?

Le réchauffement climatique global va changer l’intensité et la fréquence des extrêmes météorologiques et climatiques, alerte depuis plusieurs années le GIEC. Il agira sur la récurrence d’événements d’intensité moyenne, la date d’apparition de certains aléas – des vagues de chaleur hors de la saison d’été, par exemple – ou leur localisation.

La hausse des températures, l’évolution des précipitations, l’élévation du niveau de la mer, affecteront la santé humaine et celle des écosystèmes.

Ces perturbations modifieront les conditions de vie des populations exposées et menaceront les activités qui dépendent des températures et des précipitations, des ressources en eau, de la biodiversité, des sols.

Les effets du changement climatique concerneront aussi bien les populations, que les filières productives, les systèmes financiers, le commerce, les mobilités, etc.

Les études montrent toutefois que l’augmentation de la sinistralité à horizon 2050 résultera de la combinaison de la variabilité naturelle du climat, du changement climatique global et des dynamiques sociodémographiques propres à chaque territoire.

Le rôle des sociétés est donc déterminant. Leur résilience dépendra notamment des réponses mises en œuvre au sein des territoires. Elles se trouvent aussi bien dans l’atténuation, essentielle, que l’adaptation, terme du langage courant repris d’abord en biologie pour parler d’évolution, puis en sciences sociales pour rendre compte des interactions complexes entre nature et sociétés humaines.

Vue aérienne prise dans l’Est de la France, le 15 septembre 2020, montrant le Doubs asséché © Sebastien Bozon/AFP (via The Conversation)

Le climat de la France change déjà très rapidement

Le changement climatique est déjà là. Au cours du XXe siècle, la température moyenne a augmenté en France de 0,1 °C par décennie, avec une accélération récente menant à un écart de 1,8 °C au-dessus de l’ère préindustrielle.

Les vagues de chaleur sont plus fréquentes, la durée d’enneigement diminue. Aucun été depuis 2015 ne s’est déroulé sans une vague de chaleur extrême. Des cyclones d’intensité extrême, comme Irma, apparaissent. L’évolution des précipitations est plus contrastée, avec une augmentation sur les deux tiers de l’Hexagone et une saisonnalité plus accusée. S’il n’y a pas d’augmentation de la fréquence des tempêtes, les pluies extrêmes sont plus intenses et plus fréquentes dans le Sud-Est.

Carte des impacts du changement climatique déjà visibles et à venir d’ici 2050 pour la France © Ministère de la Transition écologique, CC BY-NC-ND (via The Conversation)

Les progrès scientifiques permettent désormais d’attribuer des événements spécifiques au changement climatique, c’est-à-dire d’évaluer combien de fois un événement particulier est plus probable à cause des activités humaines.

Le lien de causalité est démontré pour les événements liés à la chaleur, les pluies extrêmes, et des études sont en cours pour les autres phénomènes. Il est donc nécessaire d’améliorer dès à présent les dispositifs d’alerte, de gestion de crise, d’indemnisation, et de prendre en compte le changement climatique dans les politiques publiques, car les risques associés ont augmenté.

Au cœur des politiques climatiques, atténuation et adaptation

Mais il faut aller plus loin. L’action climatique s’inscrit dans la logique de prévention des catastrophes : la résilience repose sur la capacité à contrôler les chocs et stress en amont et à se préparer à des crises qu’on sait inéluctables.

Pour cela, il est à la fois possible d’agir sur les causes et sur les effets des risques climatiques.

Ces derniers résultent de la combinaison de trois composantes : l’aléa climatique et ses dérivés, soit l’ensemble des perturbations provoquées par le réchauffement global ; l’exposition directe ou indirecte des socioécosystèmes ; la vulnérabilité, c’est-à-dire le niveau de sensibilité de ces systèmes et de leur composante aux différents aléas.

Un ours polaire bondissant entre deux blocs de glace de la banquise fondante, sur l’île de Spitzberg, dans l’archipel norvégien de Svalbard © Arturo de Frias Marques/Wikimedia, CC BY-SA 4.0

Les politiques climatiques doivent donc avoir pour objectif d’atténuer l’aléa – le réchauffement global – par la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et l’atteinte de la neutralité carbone, et de s’adapter par la réduction de l’exposition et de la vulnérabilité aux impacts.

L’adaptation, tout comme l’atténuation, repose sur une large gamme d’actions, qui vont de l’ajustement ponctuel ou graduel, qui ne modifie pas fondamentalement le système, à des transformations structurelles qui font bifurquer le système en s’attaquant aux causes profondes de la vulnérabilité et de l’exposition.

Des synergies entre atténuation et adaptation

Atténuation et adaptation sont complémentaires. Si pendant longtemps l’adaptation a été vue comme une solution palliative aux échecs de l’atténuation, ces deux volets de l’action climatique ne sont pas substituables, ne serait-ce que parce qu’il est déjà nécessaire de s’adapter aux changements actuels du climat.

Repousser les efforts d’atténuation augmente mécaniquement les efforts d’adaptation à engager, mais limite aussi les possibilités de cette adaptation. Le GIEC rappelle qu’il existe des seuils au-delà desquels il n’est plus possible de s’adapter, notamment pour les plus vulnérables.

Figure extraite du chapitre 6 du rapport du GIEC « L’océan et la cryosphère dans le contexte du changement climatique » (2019) montrant les différents types d’action possibles pour faire face aux dérèglements © GIEC, CC BY-NC-ND (via The Conversation)

Atténuation et adaptation appellent des réponses qui peuvent aller de pair. Les solutions fondées sur la nature conjuguent ainsi atténuation, adaptation et protection de la biodiversité. Mais l’adaptation peut aussi nuire à l’atténuation – climatiseurs ou du dessalement de l’eau de mer par exemple, à la biodiversité ou au bien-être. Enfin, des réponses nécessaires et efficaces à court terme peuvent être source de mal-adaptation ou de mal-atténuation à moyen et long terme (digues, retenues d’eau, etc.). Il faut alors opérer des choix.

Par conséquent, les trajectoires d’atténuation, et encore plus d’adaptation, ne sont pas données : elles doivent être publiquement et démocratiquement débattues, en fonction des connaissances disponibles, révisées en fonction des évaluations, des innovations sociales et techniques, de l’évolution des valeurs.

Pour une « adaptation juste »

Si le changement est global, tous ne sont pas exposés de la même manière, ni ne sont également vulnérables. Repousser les efforts d’atténuation revient à rejeter sur les acteurs locaux et les générations futures les coûts d’une adaptation subie. Ne pas anticiper l’adaptation fait peser sur les plus fragiles les conséquences de l’inaction.

Le 28 mars 2021 à Nantes, manifestation des jeunes pour le climat © Loic Venance/AFP (via The Conversation)

Résilience et adaptation ont été fortement critiquées pour leur caractère conservateur et socialement régressif. La transition climatique doit être assortie d’une réflexion sur le juste partage des efforts entre atténuation et adaptation, entre les différentes parties prenantes, entre les territoires et entre les générations. Atténuation et adaptation ont le même objectif : assurer la résilience des sociétés et territoires face au changement climatique, en préservant la dignité des personnes, en ne dégradant pas leurs conditions de vie et en ne réduisant pas leur bien-être (voire en l’améliorant).

Il est urgent… d’accélérer

Alors que l’accord de Paris de 2015 fixait dans son article 7 un objectif d’adaptation, celle-ci est largement négligée. En France, le bilan est mince et le portage politique n’est pas à la hauteur des défis.

Si les deux Plans nationaux d’adaptation au changement climatique ont permis des progrès réels dans l’appropriation de l’adaptation par les décideurs publics, si l’adaptation commence à être intégrée localement, dans les documents de planification, d’urbanisme et d’aménagement, avec un engagement variable selon les territoires, il n’existe toujours pas de stratégie nationale d’adaptation, claquée sur le modèle de la Stratégie nationale bas carbone, révisable et évaluable, qui définisse des cibles, des indicateurs de pilotage et de suivi.

Le Haut conseil pour le climat (HCC) répète que la France, malgré une réduction de ses émissions (mais pas de son empreinte carbone), n’est pas sur la bonne trajectoire pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Il faut non seulement garder le cap, mais accélérer. En matière d’adaptation, le démarrage est timide. Il est urgent de passer à la vitesse supérieure.

Cette analyse a été rédigée par Magali Reghezza-Zitt, maître de conférences (habilitée à diriger des recherches) en géographie à l’École Normale Supérieure – PSL avec le concours de Robert Vautard, climatologue et directeur de l’Institut Pierre Simon Laplace des sciences du climat.
L’article original a été publié sur le site de The Conversation.

Pourquoi latténuation et ladaptation sont complémentaires ?
- © The Conversation

Quelles sont les stratégies d'adaptation au changement ?

la rénovation ou la construction de bâtiments mieux adaptés aux conditions climatiques extrêmes. la construction de murs contre les inondations et de digues. le déplacement de certaines infrastructures pour s'éloigner des zones inondables. le choix de cultures plus résistantes à la sécheresse.

Quelles sont les deux types de réponses face au changement climatique ?

L'adaptation et l'atténuation sont deux stratégies complémentaires pour réduire et maîtriser les risques liés au changement climatique. L'atténuation a pour objectif de limiter fortement les émissions de CO₂ et ainsi de réduire les risques climatiques dans le futur.

Quelles sont les mesures d'atténuation du changement climatique ?

La réduction des émissions, en diminuant la consommation d'énergie, en substituant les énergies actuellement utilisées par des énergies renouvelables, et en réduisant la déforestation. La « séquestration du carbone », en récupérant le dioxyde de carbone en excès dans l'atmosphère et le stocker dans la biosphère.

Pourquoi adaptation au changement climatique ?

Les politiques publiques d'adaptation ont pour objectifs d'anticiper les impacts à attendre du changement climatique, de limiter leurs dégâts éventuels en intervenant sur les facteurs qui contrôlent leur ampleur (par exemple, l'urbanisation des zones à risques) et de profiter des opportunités potentielles.